lundi, mai 05, 2008

Partisans et adversaires de l'autonomie s'affrontent à Santa Cruz

   BENITO PEREZ    

SolidaritéBOLIVIE - Les partisans du gouvernement ont perturbé la tenue du référendum autonomiste jugé illégal. Les émeutes se sont soldées par un mort et vingt blessés. 
L'affrontement était inévitable. Malgré les appels au calme du président Evo Morales, le référendum mis sur pied par la Préfecture de Santa Cruz (est) a été marqué hier par de très violentes émeutes, où se sont affrontés partisans et opposants au statut d'autonomie. A l'heure où nous mettions sous presse, les résultats du scrutin n'étaient pas connus, si ce n'est ceux de la violence: un mort et au moins 20 blessés, dont plusieurs grièvement. Dans l'ouest du pays, la journée a été marquée par d'immenses assemblées publiques à El Alto, La Paz, Oruro, Potosi et Cochabamba, où des centaines de milliers de personnes ont appelé à l'unité de la Bolivie. 

Barrages routiers

Dès l'aube, plus de 900 000 électeurs étaient appelés à se rendre dans l'un des 600 bureaux de vote du Département de Santa Cruz, première des quatre entités régionales de l'est bolivien à mettre sa menace à exécution. A l'instar de Tarija, Beni et Pando, les autorités de Santa Cruz – tenues par les opposants au gouvernement de gauche d'Evo Morales – ont fait adopter en assemblées populaires un projet de statut d'autonomie, avant de le soumettre ce dimanche – sans l'accord du parlement bolivien – au corps électoral. Le texte est qualifié de séparatiste par La Paz, car il donnerait la souveraineté fiscale, législative et agraire au département, en contradiction de la Constitution nationale en vigueur. 
La perspective fait également cauchemarder la minorité indigène de Santa Cruz, qui bénéficie des politiques de redistribution – agraire notamment – du gouvernement. C'est elle, hier, qui a ouvert les feux. Dès le matin, des milliers de partisans du gouvernement ont tenté de s'opposer à la tenue de ce scrutin jugé «illégal». Des premiers barrages routiers ont été dressés pour entraver l'acheminement des urnes à San Julián et Yapacani, à une centaine de kilomètres au nord de Santa Cruz, où le vote n'a jamais pu démarrer. A Los Angeles, près de San Julián, un militant aurait été grièvement blessé par un automobiliste opposé au blocage des routes. 
D'autres zones rurales ont également connu un scrutin très perturbé, comme Cuatro Cañadas, Montero ou San Pedro, où des dizaines d'urnes ont été brûlées. 
Mais les principaux affrontements ont eu lieu dans la banlieue populaire de Santa Cruz, à Plan 3000, où les autonomistes du centre de la capitale avaient expédié leurs jeunes troupes de l'Unión Juvenil Cruceñista défendre les urnes. Tout l'après-midi, des milliers de personnes se sont battues à coups de pierres et de pavés pour le contrôle des locaux de vote du quartier. Selon un journaliste du Courrier, quelque 250 policiers tentaient de s'opposer aux affrontements en tirant des balles en caoutchouc et des grenades lacrymogènes. Des gaz qui, à en croire Radio Erbol, auraient causé la mort d'une personne âgée. Des rumeurs avançaient un second décès, à l'arme blanche cette fois-ci. Notre journaliste n'a toutefois vu aucun activiste armé. 


Bilan contradictoire

Avant même la fermeture des locaux de vote, gouvernement central et Préfecture de Santa Cruz se disputaient autour du bilan politique de la journée. Si les autorités départementales qualifiaient le vote de «succès» et assuraient que seuls 3% des inscrits avaient été touchés par les incidents, des chiffres diffusés par La Paz brossaient un tout autre tableau, puisque 30% des tables électorales n'auraient pu fonctionner normalement. Un chiffre crédible, selon les informations de l'agence Reuters, qui relève que les artères principales de cinq des quinze provinces du département étaient totalement barrées par les anti-référendum. 
Quant au résultat du vote, il ne devait être connu que dans la nuit. Mais les chiffres ne seront de toute façon que symboliques, puisque le référendum n'est pas reconnu par la Cour nationale électorale, et n'a pas été supervisé par une instance nationale ou internationale. La Préfecture a dû confier le décompte à une société privée. Des accusations de fraude ont d'ailleurs été relayées tout au long de cette intense journée.

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