samedi, janvier 05, 2008

Un évêque brésilien prêt à tout, ou presque, pour sauver un fleuve

   RACHAD ARMANIOS    

ReligionsÉTAT DU BAHIA - Mgr Cappio, qui menait une grève de la faim contre le détournement du São Francisco, l'a interrompue. La lutte continue. 
Il avait promis que sa grève de la faim durerait tant que le projet de détournement du fleuve São Francisco ne serait pas abandonné. «Je suis prêt à mourir pour ça!», avait affirmé Mgr Luiz Flavio Cappio, un franciscain de 61 ans. Mais, dans son combat contre cette entreprise jugée désastreuse pour l'environnement, un malaise l'a emporté sur sa détermination: le 20 décembre, l'évêque de Barra, dans l'Etat brésilien de Bahia (Nord-Est), faisait savoir qu'il interrompait son action sur recommandation médicale. Il venait de sortir de l'hôpital où il avait été interné la veille dans un état semi-comateux après vingt-trois jours de jeûne. «Je mets fin à mon jeûne, mais pas à ma bataille», a-t-il écrit dans une lettre lue par un ami lors d'une messe à Sobradinho (Bahia). Deux ans après une première grève de la faim de onze jours, Mgr Cappio ne baisse toujours pas les bras, même s'il sait la lutte plus inégale que jamais: «Nous avons vu avec abattement les puissants fêter la démonstration de servilité du pouvoir judiciaire», a-t-il regretté, en référence à la décision de la Cour suprême brésilienne, le même jour que son malaise, d'autoriser la reprise des travaux pharaoniques mis en oeuvre par l'armée. Ils avaient été suspendus le 10 décembre par le Tribunal fédéral de la première région du Brésil pour irrégularités dans l'enquête préalable du Conseil national des ressources hydriques (CNRH). 


«De l'eau pour tous»

Le projet, estimé à 3 milliards de dollars, est porté par le président Lula. Il prévoit la construction de 720 kilomètres de canaux, de lacs artificiels et de réservoirs. Il va apporter de l'eau potable à 12 millions de personnes, dans une région touchée chaque année par la sécheresse, se félicite le président. 
Mais son détracteur, soutenu par l'épiscopat brésilien et des alliés historiques de Lula comme la Commission pastorale de la terre et les paysans sans terre, voit dans cet argument une tromperie. Il affirme qu'avant d'atteindre les populations concernées, le projet est d'abord destiné à irriguer les terres des multinationales de l'agro-industrie qui veulent doper la production des biocarburants. 
En outre, le détournement de 1,4% des eaux du quatrième plus grand cours d'eau d'Amérique du Sud, long de 3000 kilomètres, aura de graves conséquences économiques, sociales, environnementales et culturelles, préviennent de nombreux mouvements issus de la société civile. 


Bataille médiatique

Alors que les controverses d'ingénieurs ont tourné à la bataille médiatique, de nombreux hydrologues affirment que le détournement des eaux asséchera les régions en aval du fleuve. Avec de très graves conséquences, en particulier pour les populations vivant de la pèche. 
L'ONG Franciscans international, basée à Genève, écrit sur son site: «Les études complémentaires de l'Agence nationale des eaux et de la société civile étaient très claires: le projet reviendra deux fois plus cher que l'exploitation des eaux souterraines et des lacs artificiels, sera plus dommageable pour l'environnement (...) et ne profitera qu'à une très faible partie des populations de la région.» 
Dans sa lettre, l'évêque Cappio a insisté sur la poursuite de la lutte. Une lutte visant à «garantir l'accès à l'eau et au véritable développement à toute la population de la région semi-aride, et pas à une partie seulement». Il a mentionné son «devoir envers le Dieu de la vie, envers l'Eau vive représentant Jésus et se donnant à ceux qui vivent écrasés par les structures générant oppression et mort.» 
Alors qu'il y a deux ans l'évêque interrompait sa grève après que Lula lui avait promis d'étudier des options alternatives au détournement du fleuve – une meilleure récupération et un meilleur stockage des eaux de pluie –, ce dernier est resté ferme sur le maintien du projet dont il se dit «persuadé du bien-fondé»

Un évêque brésilien prêt à tout, ou presque, pour sauver un fleuve

   RACHAD ARMANIOS    

ReligionsÉTAT DU BAHIA - Mgr Cappio, qui menait une grève de la faim contre le détournement du São Francisco, l'a interrompue. La lutte continue. 
Il avait promis que sa grève de la faim durerait tant que le projet de détournement du fleuve São Francisco ne serait pas abandonné. «Je suis prêt à mourir pour ça!», avait affirmé Mgr Luiz Flavio Cappio, un franciscain de 61 ans. Mais, dans son combat contre cette entreprise jugée désastreuse pour l'environnement, un malaise l'a emporté sur sa détermination: le 20 décembre, l'évêque de Barra, dans l'Etat brésilien de Bahia (Nord-Est), faisait savoir qu'il interrompait son action sur recommandation médicale. Il venait de sortir de l'hôpital où il avait été interné la veille dans un état semi-comateux après vingt-trois jours de jeûne. «Je mets fin à mon jeûne, mais pas à ma bataille», a-t-il écrit dans une lettre lue par un ami lors d'une messe à Sobradinho (Bahia). Deux ans après une première grève de la faim de onze jours, Mgr Cappio ne baisse toujours pas les bras, même s'il sait la lutte plus inégale que jamais: «Nous avons vu avec abattement les puissants fêter la démonstration de servilité du pouvoir judiciaire», a-t-il regretté, en référence à la décision de la Cour suprême brésilienne, le même jour que son malaise, d'autoriser la reprise des travaux pharaoniques mis en oeuvre par l'armée. Ils avaient été suspendus le 10 décembre par le Tribunal fédéral de la première région du Brésil pour irrégularités dans l'enquête préalable du Conseil national des ressources hydriques (CNRH). 


«De l'eau pour tous»

Le projet, estimé à 3 milliards de dollars, est porté par le président Lula. Il prévoit la construction de 720 kilomètres de canaux, de lacs artificiels et de réservoirs. Il va apporter de l'eau potable à 12 millions de personnes, dans une région touchée chaque année par la sécheresse, se félicite le président. 
Mais son détracteur, soutenu par l'épiscopat brésilien et des alliés historiques de Lula comme la Commission pastorale de la terre et les paysans sans terre, voit dans cet argument une tromperie. Il affirme qu'avant d'atteindre les populations concernées, le projet est d'abord destiné à irriguer les terres des multinationales de l'agro-industrie qui veulent doper la production des biocarburants. 
En outre, le détournement de 1,4% des eaux du quatrième plus grand cours d'eau d'Amérique du Sud, long de 3000 kilomètres, aura de graves conséquences économiques, sociales, environnementales et culturelles, préviennent de nombreux mouvements issus de la société civile. 


Bataille médiatique

Alors que les controverses d'ingénieurs ont tourné à la bataille médiatique, de nombreux hydrologues affirment que le détournement des eaux asséchera les régions en aval du fleuve. Avec de très graves conséquences, en particulier pour les populations vivant de la pèche. 
L'ONG Franciscans international, basée à Genève, écrit sur son site: «Les études complémentaires de l'Agence nationale des eaux et de la société civile étaient très claires: le projet reviendra deux fois plus cher que l'exploitation des eaux souterraines et des lacs artificiels, sera plus dommageable pour l'environnement (...) et ne profitera qu'à une très faible partie des populations de la région.» 
Dans sa lettre, l'évêque Cappio a insisté sur la poursuite de la lutte. Une lutte visant à «garantir l'accès à l'eau et au véritable développement à toute la population de la région semi-aride, et pas à une partie seulement». Il a mentionné son «devoir envers le Dieu de la vie, envers l'Eau vive représentant Jésus et se donnant à ceux qui vivent écrasés par les structures générant oppression et mort.» 
Alors qu'il y a deux ans l'évêque interrompait sa grève après que Lula lui avait promis d'étudier des options alternatives au détournement du fleuve – une meilleure récupération et un meilleur stockage des eaux de pluie –, ce dernier est resté ferme sur le maintien du projet dont il se dit «persuadé du bien-fondé»